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Quand je regarde l'écran, l'écran me regarde.

la Vie & la Mort...

… de l’Oiseau de Feu

 

Une évocation croisée du grand cinéma indépendant américain

par TWIN

 

 

Badlands ****


Un film américain de Terrence Malick (95 min), sorti en salles en 1974, avec Martin Sheen, Sissy Spacek et Warren Oates. DVD Z1 édité par Warner, avec VOstf DD 5.1, VF mono.


Inspirée par l'histoire authentique de Charlie Stark-Weather, jeune délinquant des années cinquante, évocation de la folle équipée de deux jeunes amants dont l’ahurissement posé va causer la mort d’une dizaine de quidams.




Days of heaven *****

 

Un film américain de Terrence Malick (95 min), sorti en salles en 1979, avec Richard Gere, Brooke Adams et Sam Shepard. Musique signée Ennio Morricone. DVD Z1 édité par Criterion, avec VOsta DD 5.1.


Bill, ouvrier en fonderie, sa soeur Linda et sa petite amie Abby quittent Chicago pour le Texas où ils sont embauchés dans un grand domaine.

 

] Source : Allo Ciné.

 

Œuvre fondatrice du rare et précieux Terrence Malick, Badlands transforme une épopée classique à la Bonnie & Clyde en errance décalée dont la violence classique et symbolique s’imprime comme durable, insupportable du cruauté et, au final, risible.

Deux jeunes âmes esseulées se rencontrent, se cherchent, se partagent. S’aiment — ou presque, eux-mêmes ne savent sans doute pas ce que cela signifie et ce que cela implique vraiment. Ils ne s’embarrassent pas de réflexion et décident de fuir le carcan paternel, quitte à abattre au jeu du hasard et du détachement de la non responsabilité ceux qui pourront croiser leur route. Malick dresse le portrait rockwellien d’une Amérique un peu perdue, héritière de tout un patrimoine de violence et d’une image patriotique, mais qui peine à se redéfinir.

Ces êtres errent sans fin au fil d’une nature aux paysages et aux créations d’une Beauté qu’ils ne réaliseront jamais en leur sein. C’est au loisir d’une fascination éphémère pour une icône à la révolte rassurante que les personnages se sentiront exister et que le paradoxe de tout un peuple sans repères va se médiatiser.

Une œuvre fragile et importante, dont le tâtonnement comme premier long métrage ne manque jamais d’en accroître la valeur.

 

Days of heaven, la seconde réalisation de Terrence Malick est assurément sa meilleure et, connaissant l’excellence de la filmographie de cet auteur visuel, c’est peu dire quant à l’inscription de l’œuvre comme marquante pour le patrimoine des Arts cinématographiques.

Alors que les siècles passent, l’industrialisation amorce d’importants bouleversements sociaux. Les images surannées de lignées d’ouvriers agricoles, sur fond de Carnaval des animaux, se changent en images d’ouvriers industriels. Un jeune homme, impulsif et fougueux, laisse éclater sa colère contre un contremaître sur fond d’insupportable brouhaha mécanique. Un geste irréparable, et c’est la fuite.

Cet homme, figure de proue d’un trio familial au statut pervers (il est accompagné de sa maîtresse qu’il présente, pour la protéger, comme sa sœur — le sont-ils ou non ? — et d’une gamine, seule, rencontrée par hasard), dérive sur le toit d’un train d’hommes-marchandises alors qu’une voix-over innocente nous conte des histoires d’Apocalypse. Le retour à la Terre, fait d’efforts, de violence, de don de soi et de manigances déclenchera le Fléau et la colère divine, avant que la Mort ne vienne rétablir le silence.

Malick filme un pays à la beauté sauvage prompte à inonder l’iris, et transfère son œuvre en parabole sociétale où la caméra se pose comme médiatrice de l’attentisme des hommes et où se jouent des enjeux de fin du monde, vers la reprise cyclique de schémas prédéterminés.

 

Vingt ans plus tard, Malick reprendra la caméra pour filmer de jeunes hommes armés perdus sur une terre céleste, étrangère cette fois-ci, raccrochés à leurs souvenirs de poésie d’humanité personnelle, tâchant de survivre et déchaînant une violence entre gris clair et gris foncé contre un adversaire pas moins créature de peurs et de sentiments. Ca s’est appelé La Ligne rouge et c’était somptueux.

Récemment, Malick nous a fait don de Le Nouveau Monde et, infiniment, répète les mêmes thématiques, les mêmes formes de représentation. Son cinéma se destine-t-il à figurer, avec la grâce de l’Art habité, que plus les choses changent et plus elles restent les mêmes ? Si l’auteur s’acharne jusqu’à l’obstination à nous répéter le même film, il imprime la qualité d’une grande cohérence artistique.

Il est de ces cinéastes rares et précieux qui nous offrent une vision émue et doucement triste des cycles d’éveil et de mort.

 

Si Warner se contente pour Badlands de zéro supplément si ce n’est la bande annonce, sans compter l’encodage passablement pauvre du master, Criterion démontre une nouvelle fois son perfectionnisme éditorial, outre par l’excellence des prestations techniques, via la construction d’une ligne dédiée entièrement ou presque, audiovisuellement et textuellement, au complexe et avant-gardiste travail de la photo de Days of heaven, au moyen de précieux témoignages. Difficile de ne plus voir ces champs désaturés autrement que comme de grands espaces de peinture cinématographique.

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V
Oui. Les Moissons du ciel m'avait un peu ennuyé, j'ai hâte de le redécouvrir. La Ligne rouge est effectivement somptueux bien que parfois abrupt, l'utilisation de la voix over troublant le rapport entre le spectateur et le personnage.
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S
je ne connaissais pas ce film mais j'ai vu "la ligne rouge" et voir du mallick c'est un peu comme faire une sacrée expérience artistiqueune plongée dans un univers quasi mystique avec un attachement aux images travaillées, pensées dans les moindres détails
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T
Ce sont deux films à décourvrir, et à chérir, qui forment la grandeur de l'Art cinématographique.
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L
J'avoue mes très faibles connaissance en cinéma, il est donc fort intéressant de plonger dans ces études poussées... un plaisir Vance de venir te rendre visite et d'être un peu moins bête après. AMitié. Thierry
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